3 Et l’éducation ? (Ch 4)

Les années 90 ont vu beaucoup de programmes internationaux (UNESCO, UNICEF, Banque Mondiale, PNUD...) mettre l’accent sur le rôle de l’éducation dans le développement. Cela s’est traduit de 1960 à 1990 par une extension considérable de la scolarisation, surtout au niveau primaire et secondaire (le médian des taux de scolarisation dans le primaire est passé de 80%  en 1960 à 99%  en 1990). Mais cela ne s’est pas vraiment traduit par une croissance plus forte pour beaucoup de pays. Les pays africains avec une croissance rapide du capital humain entre 1960 et 1987 (Angola, Mozambique, Ghana, Zambie, Madagascar, Soudan, Sénégal) étaient quand même des désastres de la croissance ! Les miracles de la croissance pendant la même période (le Sud-Est asiatique) ont eu une croissance du capital humaine qui n’était pas plus grande que ces pays africains. En fait, la massification de l’éducation primaire et secondaire s’est accompagnée d’une baisse de la médiane des taux de croissance per capita. [Fig 4.1, page 75]

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Les travaux empiriques montrent en fait que c’est la croissance qui implique la scolarisation et non l’inverse.

Que sont devenues alors cette éducation et la qualification de la main d’oeuvre qui en découle ? Premièrement, la structure des incitations peut faire que la qualification soit utilisée pour des activité qui ne contribuent pas à la croissance mais seulement à la redistribution des richesses existantes (comme la participation aux faveurs accordées par le gouvernement en place et au lobbying). La qualité même de la scolarisation va aussi dépendre des incitations déjà en oeuvre : beaucoup de gouvernement dépenses plus pour les salaires des enseignants (d’où un effet de loyauté) que pour les fournitures scolaires et les livres... Par ailleurs, même quand l’éducation est de bonne qualité, son efficacité peut dépendre des autres investissements dans l’économie (importations de machines modernes, de nouvelles technologies) qui lui sont complémentaires. Ainsi, dans l’absence de ces facteurs, l’éducation peut aussi être gâchée et prendre la forme de chauffeur de taxi avec un diplôme d’université comme on en voyait dans les pays de l’Est.

Ces observations montrent que l’éducation n’est pas suffisante pour la croissance.