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3.1 Le modèle de Solow avec capital humain

Mankiw, G., D. Romer, D. Weil, 1992, ``A Contribution to the Empirics of Economic Growth'', Quarterly Journal of Economics, 107, 407-438. Lucas, R., 1988, ``On the Mechanics of Economic Development'', Journal of Monetary Economics, 22, 3-42. Cet article montre que le modèle de Solow est plutôt satisfaisant dans sa confrontation avec les données de la croissance économique. Il l'est encore plus si l'on l'étend de manière à tenir compte de du capital humain: les populations actives des différents pays ont des niveaux différents de formation et de qualification. Supposons maintenant que la production est réalisée en combinant le capital physique avec le travail qualifié, $ H$ suivant une fonction Cobb-Douglas

$\displaystyle Y=K^{\alpha}\left( AH\right) ^{1-\alpha}$ (3.1)

$ A$ représente un progrès technique renforçant le travail. $ A$ croît au taux exogène $ g$. Les travailleurs de cette économie peuvent augmenter leur qualification en choisissant de consacrer du temps à leur éducation au lieu de travailler. Soit $ u$ la fraction du temps d'un individu réservée à l'éducation et soit $ L$ la quantité totale de travail de base utilisée dans la production. Si la population est donnée par $ N_{t}$

$\displaystyle L_{t}=\left( 1-u\right) N_{t}.
$

L'éducation transforme le travail de base en travail qualifié selon la relation

$\displaystyle H_{t}=e^{\psi u}\cdot L_{t}$ (3.2)

$ \psi$ est une constante positive. Si $ u=0,$ $ H=L$ et la production doit se réaliser avec du travail non-qualifié. Une croissance de $ u$ implique une croissance de la quantité effective de travail utilisé dans la production. Ainsi

$\displaystyle \log H=\psi u+\log L\Rightarrow\frac{\partial\log H}{\partial u}
=\frac{\partial H/\partial u}{H}=\psi
$

Si $ u$ augmente de manière marginale, cela augmente $ H$ de $ \left(
\psi\times100\right) \%$. Cette forme exponentielle correspond donc aux résultats empiriques en économie de travail qui montrent que chaque année d'école supplémentaire correspond à un salaire reçu supplémentaire de $ 10\%$. Le capital physique est accumulé par l'investissement financé par l'épargne

$\displaystyle \dot{K}=s_{K}Y-\delta K$ (3.3)

$ s_{K}$ est le taux d'investissement et $ \delta$ est le taux de dépréciation. Nous résolvons en utilisant les valeurs per capita.

$\displaystyle y=\frac{Y}{L}=k^{\alpha}\left( Ah\right) ^{1-\alpha},\quad h=e^{\psi u}.$ (3.4)

Nous supposons pour simplifier que comme le taux d'investissement $ s_{K}$, $ u$ est exogène et constante. Par conséquent $ h$ est constant et le modèle est similaire au modèle de Solow avec progrès technique. Le long d'un SCE, $ y$ et $ k$ vont croître au taux constant $ g.$ Nous résolvons donc ce modèle en considérant les variables d'état qui sont constant sur le SCE

$\displaystyle \tilde{y}=y/Ah,\,\,\tilde{k}=k/Ah,\quad\tilde{y}=\tilde{k}^{\alpha}$ (3.5)

En suivant le même raisonnement que dans le chapitre 2, nous obtenons

$\displaystyle \dot{\tilde{k}}
 =s_{K}\tilde{y}-\left( n+\delta+g\right) \tilde{k}$ (3.6)

Sur le SCE, nous devons avoir $ \dot{\tilde{k}}
/\tilde{k}=0.$ Cela implique donc

$\displaystyle \frac{\tilde{k}^{\ast}}{\tilde{y}^{\ast}}=\frac{s_{K}}{n+\delta+g...
...}^{\ast}}\right) ^{\alpha
}=\left( \frac{s_{K}}{n+\delta+g}\right) ^{\alpha}
$

or, l'équation  % latex2html id marker 10355
$ \left( \ref{ytilda}\right) $ implique (en divisant les deux côtés par $ \tilde{y}^{\alpha}$)

$\displaystyle \tilde{y}^{\ast^{1-\alpha}}$ $\displaystyle =\left( \frac{\tilde{k}^{\ast}}{\tilde
 {y}^{\ast}}\right) ^{\alpha}=\left( \frac{s_{K}}{n+\delta+g}\right)
 ^{\alpha}$    
$\displaystyle \tilde{y}^{\ast}$ $\displaystyle =\left( \frac{s_{K}}{n+\delta+g}\right) ^{\alpha
 /\left( 1-\alpha\right) }$    

qui donne la valeur du produit par unité de travail qualifié effectif sur le sentier de croissance équilibré. Si l'on s'intéresse à l'évolution du produit/tête sur le SCE, cette équation nous donne

$\displaystyle y_{t}^{\ast}=\left( \frac{s_{K}}{n+\delta+g}\right) ^{\alpha/\left(
 1-\alpha\right) }\cdot h\cdot A_{t}$ (3.7)

qui tient compte de l'évolution du travail effectif grâce au progrès technique $ \left( A_{t}\right) $ et à l'éducation $ \left( h\right) $. Le produit/tête croît donc au taux $ g$ sur le SCE. Pour une valeur donnée de $ A,$ cette équation donne une explication plus riche de la différence de richesse qui peut exister entre les pays:

Conjecture 1   Certains pays sont riches car ils ont un taux d'investissement en capital physique élevé et/ou un taux de croissance dé mographique faible et/ou un progrès technique fort et/ou ils consacrent une fraction importante de la vie de la population à l'éducation $ \left( e^{\psi u}\right) $.

Quelle est la pertinence de cette explication en comparaison avec les données empiriques? Comme les revenus augmentent dans le temps, il vaut mieux raisonner en termes de revenus relatifs. Par exemple, si l'on définit le revenu/tête relatif d'un pays par rapport aux États-Unis,

$\displaystyle \hat{y}^{\ast}=\frac{y^{\ast}}{y_{EU}^{\ast}}
$

nous obtenons de l'équation  % latex2html id marker 10378
$ \left( \ref{dynychap3}\right) $

$\displaystyle \hat{y}^{\ast}=\left( \frac{\hat{s}}{\hat{x}}\right) ^{\alpha/\left(
 1-\alpha\right) }\cdot\hat{h}\hat{A}$ (3.8)

$ \left( \symbol{94}\right) $ indique la valeur relative de la variable par rapport à la valeur EU et $ x\equiv n+g+\delta.$ Mais $ \hat
{y}^{\ast}$ ne sera constant que si le pays croît à la même vitesse que les EU. De plus, nous allons supposer que le progrès technique a le même rythme entre les différents pays. Même si cela entre en contradiction avec un des faits stylisés les plus visibles (la diversité des taux de croissance entre les pays), le progrès technique est mal adapté pour représenter cette diversité quand la croissance est uniquement tirée par la technologie comme dans ce modèle. En effet, pour deux pays $ B$ et $ C$

$\displaystyle g_{B}>g_{C}\Rightarrow\lim_{t\rightarrow\infty}\left( y_{B}-y_{C}\right)
=\infty
$

ce qui est difficilement acceptable. Cela est en partie compensé par le transfert de technologie qui équilibre le processus. Une manière d'intégrer ce phénomène est de supposer simplement que $ g$ est constant entre les pays. Nous analyserons cet argument plus tard. Sous ces hypothèses, on peut estimer les paramètres de l'é quation  % latex2html id marker 10396
$ \left( \ref{yEU}\right) $ pour confronter ce modèle aux donnée empiriques. Cette estimation est basée sur les valeurs et définitions suivantes pour les paramètres La figure  % latex2html id marker 10410
$ \left( \ref{yEUg}\right) $ compare la valeur théorique de $ \hat{y}$ avec la valeur observée sur un diagramme à $ 45{{}^\circ}
$.
Figure 3.1: Le modèle néoclassique à l'epreuve des faits
\includegraphics[
height=10.7437cm,
width=13.171cm
]{gr31.eps}
On observe que pour tous les pays industrialisés la valeur théorique et la valeur empirique sont très proches. Pour les pays tels que Uganda ou Mozambique la valeur théorique est supérieure à la valeur empirique: pour les pays les plus pauvres, le modèle prédit une richesse plus importante que les observation (il surestime leur richesse relative). Ce résultats est en partie dû à l'hypothèse - bien héroïque - d'homogénéïté technologique. On pourrait utiliser la fonction de production % latex2html id marker 10420
$ \left( \ref{yh}\right) $ pour calculer la valeur de $ A$ pour chaque économie de manière à tenir compte de cette diversité des niveaux technologiques

$\displaystyle A=\left( \frac{y}{k}\right) ^{\alpha/\left( 1-\alpha\right) }\cdot\frac
{y}{h}
$

puisqu'il suffit de calculer ces différents éléments à partir des données empiriques. En effectuant ce calcul pour $ 1990$ et en intégrant ces valeurs de $ A$ pour calculer les valeurs théoriques de $ \hat{y},$ nous obtenons un nouvel ajustement (voir Figure 3.2).
Figure 3.2: Ajustement avec diversité technologique
\includegraphics[
trim=0.000000in 0.000000in -0.001622in 0.011871in,
height=8.0309cm,
width=9.8826cm
]{gr32.eps}
La conclusion saute aux yeux: la prise en compte de la diversité technologique améliore considérablement l'ajustement du modèle néo-classique aux données. Ce modèle nous donne donc une explication assez pertinente des différences de richesse entre les pays (Conjecture 1).
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Yildizoglu Murat
2001-12-15