next up previous contents
Next: 2.3 Incertitude et probabilités Up: 2. Décision dans l'incertain Previous: 2.1 Le concept d'Utilité

Sous-sections


2.2 Utilité de la monnaie
et aversion pour le risque

Tous les individus n'ont pas le même comportement face au risque et cette différence correspond à des degrés différents d'aversion pour le risque.

Comment caractériser cette aversion?

Les goûts des consommateurs sont en général représentés par leurs préférences et donc par leur fonction d'utilité.

Par conséquent, cette aversion aussi doit être représentée par leur fonction d'utilité.

Pour cela, nous allons nous placer dans le cas où les lots sont des sommes monétaires et donc $ X\subset\mathbb{R}$.

Sous les hypothèses $ \left( 1-3\right) $ et donc la Proposition 10, nous avons une représentation avec espérance d'utilité des préférences.

Rappel 2   La loterie qui donne le lot $ x$ avec la probabilité $ 1$ sera notée $ \delta_{x}$.

Il est alors raisonnable de supposer que le consommateur préfère plus d'argent à moins.

Proposition 11   Supposons que pour tout $ x,y\in X$ avec $ x>y$, $ \delta_{x}\succ\delta_{y}$. Cela est vrai si et seulement si la fonction $ u$ est strictement croissante.

Nous allons maintenant introduire le concept d'aversion pour le risque.

Notation 3   Pour toute loterie $ p$, nous notons la valeur espérée de cette loterie par

$\displaystyle Ep\equiv\sum_{x}xp\left( x\right)$   .

Proposition 12   Si pour toutes les loteries $ p$ nous avons $ \delta_{Ep}\succsim p$ alors la fonction d'utilité $ u$ est concave et nous dirons que le consommateur a de l'aversion pour le risque. Si, au contraire, nous avons $ p\succsim\delta_{Ep}$ alors la fonction d'utilité est convexe et nous dirons alors que le consommateur aime le risque. Si $ p\sim\delta_{Ep}$ alors la fonction d'utilité est linéaire et le consommateur est neutre vis-à-vis du risque.

Prenons l'exemple suivant pour comprendre les implications de cette proposition.

Un individu qui dispose de $ 100F,$ peut participer à une loterie dans la quelle il a une chance sur deux de gagner $ 50F$ et la même chance de perdre $ 50F.$

L'espérance mathématique de son revenu est :

$\displaystyle E\left( R\right) =0.5\cdot\left( 100+50\right) +0.5\cdot\left(
100-50\right) =100.
$

C'est la valeur attendue de son revenu.

Sa fonction d'utilité est $ u\left( R\right) .$ L'espérance d'utilité est alors donnée par

$\displaystyle U=0.5\cdot u\left( 150\right) +0.5\cdot u\left( 50\right) .
$

Nous avons alors trois cas possibles :

a) Aversion pour le risque

\fbox{\includegraphics[scale=1.4]{incert6.eps}}

Dans ce cas, nous avons :

$\displaystyle u\left( 0.5\cdot50+0.5\cdot150\right) =u\left( 100\right)$    
$\displaystyle >$    
$\displaystyle U\left( 50,150\right) =0.5\cdot u\left( 50\right) +0.5\cdot u\left( 150\right)$    
$\displaystyle u\left( E\left( R\right) \right) >E\left( u\left( R\right) \right) .$    

L'individu préfère ne pas jouer et garder les $ 100F$ qu'il possède déjà avec certitude. Il a donc de l'aversion pour le risque. Cela correspond donc à une fonction d'utilité de revenu $ \left( u\left(
R\right) \right) $ concave $ \left( u^{\prime\prime}<0\right) $.

b) Amour de risque

\fbox{\includegraphics[scale=1.4]{incert7.eps}}

C'est la situation inverse. Dans ce cas, l'individu préfère la loterie même si elle est risquée. La perspective de gagner $ 150F$ dans le cas favorable l'incite à y jouer :

$\displaystyle U\left( 50,150\right) =Eu\left( R\right) >u\left( E\left( R\right)
\right) =u\left( 100\right) .
$

Dans ce cas la fonction d'utilité est convexe $ \left( u^{\prime\prime
}>0\right) .$

c) Neutralité vis-à-vis du risque

C'est la cas d'une fonction d'utilité linéaire $ \left( u^{\prime
\prime}=0\right) .$

Cette fonction se confond alors avec la corde $ AB$ et

$\displaystyle u\left( E\left( R\right) \right) =E\left( u\left( R\right) \right) .
$

Dans ce cas, les choix de l'individu se basent sur l'espérance mathématique du revenu.

2.2.1 Équivalents certains

De manière plus générale, pour toute loterie $ p$ qui donne $ x$ avec une probabilité $ \alpha$ et $ x^{\prime}$ avec une probabilité $ \left( 1-\alpha\right) ,$ nous pouvons trouver une somme $ x^{\ast}$ telle que $ u\left( x^{\ast}\right) =\alpha u\left( x\right) +\left(
1-\alpha\right) u\left( x^{\prime}\right) $ (par le Théorème de valeur intermédiaire).

Dans ce cas $ \delta_{x^{\ast}}\sim p.$

Définition 15   L'équivalent certain d'une loterie $ p$ est un lot $ x$ tel que $ \delta_{x}\sim p$.

Proposition 13   Si $ X$ est un intervalle de $ \mathbb{R}$ et $ u$ une fonction continue alors toute loterie $ p$ possède au moins un équivalent certain. Si $ u$ est strictement croissant alors $ p$ possède au plus un équivalent certain.

\fbox{\includegraphics[scale=1]{incert11.eps}}

A partir de maintenant nous allons supposer que la fonction d'utilité de von Neumann-Morgenstern $ \left( VNM\right) $ $ u$ est continue, strictement croissante, concave (aversion pour le risque) et de classe $ \mathcal{C}^{2}$ (deux fois continûment différentiable).

Par conséquent, chaque loterie possède un équivalent certain unique $ C\left( p\right) $.

Remarque 10   L'aversion pour le risque implique, comme le montre la figure précédente, $ C\left( p\right) \leq Ep$.

Définition 16   La différence $ R\left( p\right) \equiv Ep-C\left( p\right) $ est la prime de risque de $ p$.

2.2.2 Aversion absolue et aversion relative

Définition 17   L'opérateur $ \oplus$ est défini de la manière suivante : si $ p$ est une loterie et $ z$ une somme monétaire, la loterie $ p\oplus z$ est la loterie qui donne le lot $ x+z$ avec la probabilité $ p\left( x\right) $. $ p\oplus z$ est donc la loterie qui est construite à partir de $ p$ en augmentant du montant $ z$ chacun des lots de $ p$.

Si les lots représentent la richesse du consommateur à l'issue du tirage et si nous augmentons $ z$ dans $ p\oplus z$, nous augmentons la richesse globale du consommateur.

Quel sera l'impact de cette variation de la richesse sur le comportement face au risque du consommateur?

Il est relativement naturel d'imaginer que quand sa richesse augmente, l'individu devient moins sensible au risque quand il joue à des loteries.

Alors si $ z$ augmente (la richesse du consommateur augmente), $ R\left(
p\oplus z\right) $ ne doit pas augmenter pour toute loterie donnée $ p$.

Définition 18   Pour un consommateur donné avec une fonction d'utilité VNM $ u$,

a)
si $ R\left(
p\oplus z\right) $ est non-croissant en $ z$ alors le consommateur a une aversion non-croissante (décroissante selon d'autres terminologies) pour le risque et $ u$ est une fonction d'utilité DARA (Decreasing Absolute Risk Aversion);

b)
si $ R\left(
p\oplus z\right) $ est constant $ z$ alors le consommateur a une aversion constante pour le risque et $ u$ est une fonction d'utilité CARA (Constant Absolute Risk Aversion);

c)
si $ R\left(
p\oplus z\right) $ est non-décroissant en $ z$ alors le consommateur a une aversion non-décroissante (croissante selon d'autres terminologies) pour le risque et $ u$ est une fonction d'utilité IARA (Increasing Absolute Risk Aversion);

L'hypothèse que nous avons présentée comme étant naturel revient alors supposer que le consommateur a une aversion non-croissante ou constante pour le risque.

Cela peut être formulé en termes de propriétés de la fonction d'utilité VNM $ u$.

Définition 19   Étant donnée une fonction d'utilité VNM $ u$ (de classe $ \mathcal{C}^{2}$, strictement croissante et constante),

$\displaystyle \lambda\left( x\right) =-u^{\prime\prime}\left( x\right) /u^{\prime
}\left( x\right) \geq0
$

est le coefficient d'aversion absolue pour le risque du consommateur.

Proposition 14  
a)
Le consommateur a une aversion absolue non-croissante pour le risque si et seulement si son $ \lambda$ est une fonction non-croissante de $ x;$

b)
Le consommateur a une aversion absolue non-décroissante pour le risque si et seulement si son $ \lambda$ est une fonction non-décroissante de $ x;$

c)
Le consommateur a une aversion absolue constante pour le risque si et seulement si son $ \lambda$ est une fonction constante de $ x.$ Dans ce cas la fonction $ u$ est une transformation positive affine de la fonction $ -e^{-\lambda x}.$ Si $ \lambda=0$ alors $ u$ est une transformation positive affine de $ x$ et le consommateur est neutre vis-à-vis du risque.

Remarque 11   $ \lambda$ n'est rien d'autre que la valeur absolue de l'indice de courbure (concavité) de la fonction $ u$. On dira alors que le consommateur $ A$ avec une fonction d'utilité $ v\left( x\right) $ a au moins autant d'aversion pour le risque que le consommateur $ B$ avec la fonction d'utilité $ w\left( x\right) $ si $ v$ est plus concave que $ w$ pour tout $ x$

$\displaystyle \rho\left( x\right) =-v^{\prime\prime}\left( x\right) /v^{\prime}...
...) =w^{\prime\prime}\left( x\right)
/w^{\prime}\left( x\right) ,\quad\forall x.
$

Définition 20   Le coefficient $ \mu\left( x\right) \equiv-xu^{\prime\prime}\left( x\right)
/u^{\prime}\left( x\right) $ est le coefficient d'aversion relative pour le risque.

Observons que $ \mu\left( x\right) =-\varepsilon_{u^{\prime},x}$.


next up previous contents
Next: 2.3 Incertitude et probabilités Up: 2. Décision dans l'incertain Previous: 2.1 Le concept d'Utilité
Yildizoglu Murat
2002-04-27