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Sous-sections


5.1 Éléments de base du modèle

Le modèle de Romer endogénéise le progrès technique en introduisant la recherche de nouvelles idées par des inventeurs intéressés par les profits qu'ils peuvent obtenir grâce à leur innovation. Le modèle vise à expliquer pourquoi les pays développés bénéficient d'une croissance soutenue. Ce modèle décrit les pays développés du monde dans leur ensemble. Le progrès technique résulte de la recherche-développement effectué dans l'ensemble du monde développé. Comme dans le modèle de Solow, il y a deux éléments fondamentaux dans le modèle de croissance endogène de Romer : une équation décrivant la fonction de production et un ensemble d'équations décrivant la manière dont les inputs évoluent dans le temps. La fonction de production agrégée

$\displaystyle Y=K^{\alpha}\left( AL_{Y}\right) ^{1-\alpha},$ (5.1)

$ \alpha$ est un paramètre compris entre 0 et 1. $ L_{Y}$ est le travail consacré à la production. Pour un niveau donné de la technologie, $ A,$ cette fonction de production a des rendements constants en $ K$ et en $ L_{Y}.$ Mais, si l'on considère que les idées $ \left( A\right) $ sont aussi un facteur de production, la technologie a des rendements croissants:

$\displaystyle F\left( tK,tA,tL\right)$ $\displaystyle =\left( t^{\alpha}K^{a}\right) \cdot\left(
 t^{1-\alpha}A^{1-\alpha}\right) \cdot\left( t^{1-\alpha}L_{Y}^{1-\alpha
 }\right)$    
$\displaystyle F\left( tK,tA,tL\right)$ $\displaystyle =t^{2-\alpha}\cdot F\left( K,A,L\right)
 >t\cdot F\left( K,A,L\right) .$    

Comme nous l'avons déjà vu, la présence des rendements croissants résulte de l'utilisation non-rivale des idées. Les équations d'accumulation du capital et du travail sont similaires à celles du modèle de Solow:

$\displaystyle \dot{K}$ $\displaystyle =s_{K}Y-\delta K,$    
$\displaystyle \frac{\dot{L}}{L}$ $\displaystyle =n.$    

L'équation clé est celle décrivant l'évolution du progrès technique. Dans le modèle néo-classique, le terme de productivité $ A$ croît à un taux constant de manière exogène. Dans le modèle de Romer, l'évolution de $ A$ est endogénéisée. $ A\left( t\right) $ est le stock des idées qui ont été inventées jusqu'au moment $ t.$ Par conséquent $ \dot{A}$ donne le nombre de nouvelles idées inventées à chaque moment. Dans la version la plus simple du modèle, nous avons

$\displaystyle \dot{A}=\tau L_{A}$ (5.2)

$ L_{A}$ est le nombre de personnes consacrant leur temps à la recherche de nouvelles idées et $ \tau$ est le taux auquel ils trouvent de nouvelles idées. Par conséquent,

$\displaystyle L=L_{Y}+L_{A}.$ (5.3)

D'autre part, $ \tau$ peut dépendre (positivement ou négativement) des idées déjà trouvées

$\displaystyle \tau=A^{\phi},\quad\phi<1,$ (5.4)

et la productivité moyenne de la recherche peut dépendre du nombre de personnes qui consacrent leur temps à la recherche et développement. Cela revient à considérer que ce qui entre dans la production de nouvelles idées n'est pas $ L_{A},$ mais $ L_{A}^{\lambda},$ $ \lambda\in\left[ 0,1\right] $ traduit la duplication des efforts de recherche. Ainsi l'évolution du stock de connaissances est donnée par :

$\displaystyle \dot{A}=\rho\cdot L_{A}^{\lambda}\cdot A^{\phi}.$ (5.5)

Les équations  % latex2html id marker 10622
$ \left( \ref{thau}-~\ref{RD}\right) $ montrent un aspect très important des modèles de croissance économique. Les chercheurs individuels, qui sont petits comparés au reste l'économie, prennent $ \tau$ comme une donnée, et observent des rendements constants dans la recherche. Dans l'équation % latex2html id marker 10626
$ \left( ~\ref{dynA1}\right) ,$ un chercheur produit $ \tau$ nouvelles idées. Au niveau global, la fonction de production de nouvelles idées n'a pas nécessairement des rendements constants (équation % latex2html id marker 10630
$ \left( ~\ref{RD}\right) \,$: même si $ \tau$ varie très faiblement face aux actions d'un chercheur individuel, il réagit très clairement aux variations de la recherche totale. Exemples :

5.1.1 Croissance dans le modèle de Romer

Quel est le taux de croissance le long du SCE dans ce modèle ? Si une fraction constante de la population est employée à la production des idées, ce modèle arrive à la même conclusion que le modèle néo-classique: toute la croissance per capita et due au progrès technique. Ainsi devons-nous avoir

$\displaystyle \gamma_{y}=\gamma_{k}=\gamma_{A}
$

comme dans le modèle de Solow avec progrès technique. Quel est le taux du progrès technique le long du SCE ? Pour répondre à cette question, nous devons partir de l'équation % latex2html id marker 10641
$ \left(
~\ref{RD}\right) $

$\displaystyle \frac{\dot{A}}{A}=\rho\frac{L_{A}^{\lambda}}{A^{1-\phi}}.$ (5.6)

Or, le long du SCE nous devons avoir $ \dot{A}/A\equiv\gamma_{A}=Cste.$ Cela n'est possible que si le numérateur et le dénominateur de l'équation % latex2html id marker 10647
$ \left( ~\ref{dynA2}\right) $ augmentent à la même vitesse, c'est-à-dire

$\displaystyle 0=\lambda\frac{\dot{L}_{A}}{L_{A}}-\left( 1-\phi\right) \frac{\dot{A}}{A}.$ (5.7)

De plus, le long du SCE, nous devons avoir $ \dot{L}_{A}/L_{A}=\dot{L}/L=n.$ Ce qui nous donne

$\displaystyle \fbox{$\gamma_A=\dfrac{\dot{A}}{A}=\dfrac{\lambda n}{1-\phi}$}$ (5.8)

Le taux de croissance de long terme de l'économie est par conséquent déterminé par les paramètres de la fonction de production des idées et le taux de croissance de population.
Cas particulier :

$\displaystyle \lambda=1,\phi=0\Rightarrow\tau=\rho,\quad\dot{A}=\rho L_{A}
$

si $ L_{A}$ est constant, la somme de nouvelles idées créées à chaque période est constante et la part de nouvelles idées dans le stock total diminue avec le temps. Par conséquent, $ \dot{A}/A=0.$ La croissance soutenue n'existe que si le nombre de nouvelles idées créées à chaque période est croissant. Cela est possible si la population affectée à la recherche est croissante ou, si la population totale augmente:

$\displaystyle \gamma_{y}=\gamma_{A}=n.
$

Ce résultat est similaire à celui du modèle de Solow avec progrès technique. Mais le mécanisme qui est derrière ce résultat est bien différent car il passe par la création endogène de nouvelles idées: une population plus importante génère plus d'idées, et comme l'utilisation des idées est non-rivale, tout le monde en profite.

Remarque 2   Le modèle suggère que si la croissance de population s'arrête, la croissance économique doit s'arrêter aussi. De plus, si l'effort de recherche reste constant, cela devrait conduire aussi à une croissance nulle. Un effort de recherche constant ne peut pas soutenir les augmentations proportionnelles du stock de connaissances nécessaires à la croissance de long terme.

Remarque 3   Un cas particulier élimine ce résultat et cela correspond à la fonction de production des idées du modèle originel de Romer (1990): $ \lambda=1$ et $ \phi=1$

$\displaystyle \dot{A}=\rho L_{A}A\Rightarrow\frac{\dot{A}}{A}=\rho L_{A}
$

et donc la croissance est possible même avec un effort constant de recherche car la productivité de recherche $ \tau=\rho A$ est croissant dans le temps même si le nombre de chercheurs est constant. Même s'il est séduisant, cette idée de Romer est en contradiction avec les faits car les taux de croissance des économies occidentales n'ont pas considérablement augmenté pendant le siècle dernier malgré une croissance très forte de l'effort de recherche et de développement. Ce résultat empirique implique $ \phi<1,$ comme nous l'avons supposé.

Remarque 4   Dans tous les cas de figure, des politiques économiques ne peuvent influencer le taux de croissance d'une telle économie car aucune des variables figurant dans l'équation % latex2html id marker 10676
$ \left( ~\ref{dynA3}\right) $ n'est influencée par les politiques habituelles malgré le fait que le progrès technique soit maintenant endogène.

5.1.2 Statiques comparative

Quelle serait l'influence d'une augmentation permanente de la part des chercheurs dans la population sur l'évolution des économies avancés suite, par exemple, à des aides publiques visant à augmenter l'effort de R&D? Supposons : $ \lambda=1$ et $ \phi=0.$ Réécrivons l'é quation 5.6

$\displaystyle \frac{\dot{A}}{A}=\rho\frac{s_{R}L}{A}$ (5.9)

$ s_{R}$ est la part de la population engagée en R&D $ \left(
L_{A}=s_{R}\cdot L\right) $. La situation que nous considérons correspond donc à une augmentation de $ s_{R}.$
\includegraphics[
trim=0.000000in 0.000000in -0.004042in 0.000985in,
height=6.0231cm,
width=8.2461cm
]{GR51.eps}
SCE initial : $ \gamma_{A}/\rho=L_{0}/A_{0}.$ $ s_{R}\nearrow$ en $ t_{0}
\Rightarrow L_{A}/L\nearrow,$ $ L_{A}/A\nearrow$ $ \left( X\right) .$
Mais en $ X,$ $ \gamma_{A}=\dot{A}/A>n$ donc $ L_{A}/A\searrow$ $ \,$jusqu'à ce que l'économie revient à $ \gamma_{A}=n.$ Par conséquent l'effet d'une augmentation permanente de $ s_{R}$ est transitoire:
\includegraphics[
height=6.0231cm,
width=11.5147cm
]{GR52.eps}
Mais alors que devient le niveau technologique de l'économie?
. Dynamiques de transition similaires à celles du modèle de Solow suite à une augmentation de $ s$. . Étant donné que le taux de croissance est constant, nous devons notamment avoir $ y/A$ constant

$\displaystyle \left( \frac{y}{A}\right) ^{\ast}=\left( \frac{s_{K}}{n+\gamma_{A}+\delta
 }\right) ^{\alpha/\left( 1-\alpha\right) }\left( 1-s_{R}\right)$ (5.10)

Le long d'un SCE, l'équation  % latex2html id marker 10722
$ \left( \ref{dynA4}\right) $ peut être résolu pour $ A$

$\displaystyle A=\frac{\rho s_{R}L}{\gamma_{A}}
$

et cela donne avec l'équation  % latex2html id marker 10728
$ \left( \ref{y/A}\right) $

$\displaystyle y^{\ast}\left( t\right)$ $\displaystyle =\left( \frac{s_{K}}{n+\gamma_{A}+\delta
 }\right) ^{\alpha/\left...
...ha\right) }\left( 1-s_{R}\right)
 \frac{\rho s_{R}}{\gamma_{A}}L\left( t\right)$ (5.11)
$\displaystyle y^{\ast}\left( t\right)$ $\displaystyle =\mu\cdot L\left( t\right)$ (5.12)

Effet d'échelle : une économie mondiale plus grande est aussi une économie plus riche. Cela provient de la nature non-rivale des idées: une économie plus grande correspond à un marché plus grand pour une idée et donc à un rendement plus grand (effet de demande). De plus, une économie peuplée de plus d'individus bénéficient de plus d'inventeurs et donc crée plus d'idées (effet d'offre).
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Yildizoglu Murat
2001-12-15